« LeBron James reste le meilleur joueur du monde, mais le MVP, c’est Kevin Durant ». C’est ce qu’a déclaré cette nuit Doc Rivers, et sa formule est, semble-t-il, partagée par une grande majorité de personnes. Une grande majorité dont je ne fais pas partie.
Je pense évidemment que Kevin Durant est le MVP de la saison, mais j’ajouterais aussi qu’il est devenu le meilleur joueur de la planète. Contrairement à Derrick Rose en 2011, il n’est pas un MVP par défaut, et il ne profite pas des malheurs de LeBron James ou de sa baisse de régime. Si Durant est MVP, c’est parce qu’il est, je crois, devenu le meilleur joueur actuel. Il était déjà le meilleur attaquant (même si Carmelo Anthony peut lui revendiquer ce titre), et il est devenu aujourd’hui le meilleur basketteur.
Kevin Durant rend désormais les autres meilleurs
Durant a d’abord progressé comme leader puisqu’il a porté son équipe à bout de bras toute la saison, comme pouvaient le faire ces dernières années LeBron James aux Cavs, Dirk Nowitzki aux Mavs ou Kobe Bryant aux Lakers. N’oublions pas ainsi que Russell Westbrook a manqué 30 matches, et le duo Perkins-Sefolosha une vingtaine. Si le Thunder s’est maintenu au sommet (2ème de la NBA !), c’est parce que Durant rend enfin ses coéquipiers meilleurs. Il continue de scorer de manière exceptionnelle, apporte toujours autant de rebonds, et distribue même plus de passes. Il joue moins l’isolation, et je le trouve aussi plus patient. Il se projette toujours aussi vite vers l’avant mais il agit comme un leader, un guide. Bien sûr, il l’était déjà depuis quelques années, mais cette saison, il n’avait pas de James Harden ou de Kevin Martin pour l’épauler. Il lui a fallu faire confiance à ses jeunes coéquipiers, en responsabilisant davantage un Jackson ou un Lamb. Il lui a fallu se calmer alors qu’il était parti pour approcher les 30 fautes techniques. Il lui a fallu, enfin, résister à la pression des défenses concentrées sur lui lorsque Westbrook était absent. Cette saison, Durant m’a rappelé Michael Jordan ou Kobe Bryant par cette faculté à prendre, seul, le dessus sur une défense. Le tout avec un talent qui tutoie l’insolence, et une adresse presque démoralisante. Personnellement, je ne comprends toujours pas comment un joueur avec de tels segments peut être aussi adroit de loin. Pour moi, au niveau de l’adresse aux tirs, Durant est une anomalie du basket.
LeBron James a régressé en défense
Vient ensuite le domaine de la défense. On a souvent écrit que LeBron James était le basketteur le plus complet parce qu’il avait aussi progressé en défense, au point que son nom apparaissait parmi les joueurs susceptibles d’être élu meilleur défenseur de l’année. Franchement, cette saison, j’ai surtout trouvé qu’il avait régressé. C’est sans doute de la fatigue, mentale et physique. Plusieurs fois, je l’ai vu se faire passer très facilement par des ailiers modestes. A l’image du Heat, LeBron a failli en défense cette saison. Attention, je n’écris pas que Durant défend mieux que lui. Je dis que la défense n’est plus un secteur qui permet de différencier les deux joueurs.
Bien évidemment, certains vont me balancer la différence de palmarès au visage. Oui, LeBron est double champion NBA et quadruple MVP en titre. Mais je n’ai jamais estimé qu’il faille attendre qu’un joueur gagne des titres pour qu’il entre au Hall Of Fame ou devienne le meilleur joueur de la planète. Jordan était déjà le meilleur joueur au monde avant d’être champion. LeBron aussi. Pour moi, Durant est dans la même situation.
Tim Duncan pour les arbitrer ?
Mon seul bémol, c’est qu’une saison au sommet ne suffit pas pour devenir le meilleur joueur du monde. Je crois qu’il faudra encore patienter pour que Durant ne prenne définitivement le pouvoir. Comme Larry Bird en son temps. Comme Michael Jordan. Puis enfin comme LeBron James. Ils ont tout dominé le basket sur plusieurs années. Et « plusieurs » signifie plutôt trois ans que deux. Il s’agit donc d’une saison charnière, et c’est ce qui va rendre les playoffs encore plus intéressants. Car au-delà de la rivalité collective entre le Heat et le Thunder, qui pourraient nous jouer la revanche de 2012, il s’agira peut-être, à distance, d’une passation de pouvoir. Pour jouer le rôle d’arbitre, ou les renvoyer tous les deux dos à dos, l’immense Tim Duncan qui fut double MVP, et pourtant jamais vraiment considéré comme le meilleur joueur du monde.