Après le dernier match de préparation avant le début de la compétition officielle à Lille, Vincent Collet a pris le temps de répondre aux nombreuses questions des médias en conférence de presse, à Orléans.
Il faut dire qu’après quatre défaites consécutives, les interrogations foisonnent, que ce soit à propos du poste de meneur toujours aussi problématique, ou au sujet d’une attaque tricolore encore trop balbutiante, voire sur le niveau d’intensité de cette préparation.
On lui a également demandé quel était exactement le rôle de Kenny Atkinson dans le staff des Bleus…
« Quand le match commence, je ne ne sais jamais quel extérieur va être performant »
Vincent, vous essuyez un nouveau revers, un quatrième de suite, quelles sont vos réactions à chaud ? Êtes-vous inquiet de cette série négative ?
C’est un match moins inquiétant que les précédents. On est forcément déçu et bien conscient qu’on vient de perdre quatre fois de suite, même si c’est contre des équipes très fortes et candidates au podium. C’est sûr qu’on aurait aimé prendre ce dernier match pour prendre un bol d’oxygène au niveau de la confiance. On savait que c’était une éventualité donc on est prêt à continuer à bosser. On n’oublie pas que la compétition n’a pas commencé et elle est toujours différente de la préparation. On n’est pas forcément content de cette série de défaites, mais il n’y a pas d’autre alternative que de continuer à progresser et c’est ce qu’on a fait par rapport au match [face au Canada]. Dans le contenu, on a des choses qui s’améliorent, et d’autres pas assez, c’est comme ça, on fait avec nos moyens.
Vous évoquiez récemment chercher de la sérénité, et ne pas tomber dans des temps faibles qui s’éternisent, trouvez-vous qu’il y a eu du mieux face à l’Australie ?
Un peu. Mais il y a encore du déchet. C’est lié à certaines prestations et de nouvelles associations. On est encore en train de chercher des cinq qui fonctionnent, qui soient le plus équilibré possible et trouvent une certaine alchimie. On commence à voir des choses émerger. Mais, dans le secteur extérieur, elles sont remises en question quasiment à chaque match. C’est une des difficultés que l’on a, mais on va continuer à travailler et il n’y a pas de raison qu’on y arrive pas. Le manque de constance général, il est dû à ces sautes d’humeur. Quand le match commence, je vous avoue que je ne sais jamais trop quel joueur extérieur va être performant. Pour l’instant, je ne peux pas le savoir…
Après la défaite face au Canada, vous appeliez de vos voeux une victoire face à l’Australie, ne serait-ce que pour la confiance du groupe. Ce n’est pas le cas, comment avez-vous rassuré vos joueurs ?
Même si on avait gagné ce match, ce ne serait pas forcément plus rassurant… Si Nico ne perd pas la balle au rebond, on a match gagné. Mais on ne serait pas plus rassuré. Et je crois qu’il ne faut pas qu’on le soit ! Avec l’équipe qu’on a, on a besoin de combat, de détermination pour performer. Il faudra qu’on se batte. La seule chose qui m’importe, c’est de battre le Brésil samedi après-midi, même si je sais que ça va être compliqué. Je comprends qu’il y ait beaucoup d’interrogations sur notre niveau, mais je sais aussi que les choses peuvent aller vite, dans un sens comme dans l’autre. On doit mettre à profit ces six jours à venir pour préparer ce premier match qu’on doit gagner.
Vous terminez de nouveau au-dessus du cap des 20 balles perdues, n’est-ce pas rédhibitoire à ce niveau de compétition ?
C’est un élément de jeu sur lequel on doit progresser, c’est clair. Surtout, on a beaucoup de balles perdues qui ne sont pas forcées, qui résultent de prises de risque inconsidérées. On a eu pas mal d’occasions, notamment en première mi-temps, où on a du jeu de relance pour des paniers faciles mais au contraire, on perd la balle et on est sanctionné de l’autre côté. Dans le vestiaire, il y a effectivement de la frustration mais on a un bon groupe qui va retrouver l’énergie qui nous anime. Quand vous jouez les meilleures équipes mondiales, vous n’êtes pas sûrs de gagner ! On pensait bien en arracher un sur deux, ou deux sur quatre. Ce n’est pas le cas, on le regrette. Mais ça nous montre justement à quel point il va falloir se battre pour rêver. Mais il faut continuer à rêver.
Vous avez été bien secoués physiquement pendant cette prépa, ce qui était une volonté affichée dès le début, êtes-vous toujours persuadé du bienfondé de cette théorie ?
C’est un bien, oui. Quand tu joues à un niveau d’intensité moyen, tu n’es pas sûr de pouvoir t’adapter à un niveau d’intensité plus fort. Là, ça ne sera pas plus fort. Ou du moins, ça sera équivalent. Dans nos problèmes offensifs, c’est la raison principale. Quand on a eu une défense moyenne face à nous, comme face à l’Allemagne au premier match, on a marqué 90 points. Mais c’était en trompe-l’œil ! Ce n’est pas le niveau qu’on va jouer [aux JO]. On va voir ce que nos adversaires vont pouvoir faire, si c’est du niveau du Canada ou de l’Australie.
« Pour qu’une équipe soit plus sereine, il faut qu’on puisse savoir sur quels joueurs on peut s’appuyer »
Victor Wembanyama a fini ce match tout proche du triple-double, à 17 points, 12 rebonds et 8 passes, avez-vous apprécié son apport à la création notamment ?
Même si on n’arrive pas encore à le trouver aussi près du cercle [qu’on le souhaiterait], c’est quand même un peu mieux. Et de manière générale, on a réussi à le trouver. Il a été plus actif sur ce match [que les deux derniers]. Ça va créer de la complicité avec les coéquipiers. Ils vont comprendre à quel point c’est important de le servir dans de bonnes conditions. C’est notre meilleur joueur et, tout comme il reçoit un traitement spécial de la part de nos adversaires, il faut qu’il ait un traitement spécial de la part de notre équipe aussi…
Les joueurs extérieurs ont apporté plus de scoring sur ce match, que ce soit Matthew Strazel ou Frank Ntilikina, tous deux à 7 points par exemple, est-ce que ça progresse selon vous ?
Nando a apporté beaucoup. Le retour de Nico a été important aussi. Je trouve qu’il y a une nette amélioration. Globalement, ce match est encourageant et c’est pour ça que je regrette qu’on ne l’ait pas gagné car cela aurait été la cerise sur le gâteau. Je l’ai dit aux joueurs dans les vestiaires, il y a tout de même la satisfaction d’avoir été bien meilleur et plus cohérent, en particulier en attaque. Ce que j’évoquais sur le secteur extérieur, c’est plus l’irrégularité. Pour qu’une équipe soit plus sereine, il faut qu’on puisse savoir sur quels joueurs on peut s’appuyer et derrière, on a une ou deux bonnes surprises qui aident aussi. Pour le moment, ce n’est pas comme ça pour nous, on doit faire avec.
Défensivement, c’est plutôt positif en tenant l’Australie à 83 points au final…
[Il coupe] J’étais vraiment déçu de notre entame défensive. On n’était pas assez intense, pas assez dur, surtout sur le secteur extérieur. On les laissait un peu jouer. Et puis, en attaque, on ne jouait pas bien. La balle ne bougeait pas suffisamment. Donc perte de balle et contre [australien]. Ou tirs forcés et on est sanctionné derrière. À ce niveau, la sanction arrive toujours très vite. Le fait de jouer juste, c’est la seule protection contre ces points rapides [de l’adversaire]. D’où l’importance d’augmenter le pourcentage de possessions maîtrisées.
On a beaucoup parlé de l’association entre Rudy Gobert et Victor Wembanyama, où en êtes-vous dans vos expérimentations avec ces « tours jumelles » ?
Il y a des moments où ça fonctionne bien, d’autres moins. Défensivement au moins, c’est bien en place. Victor est très mobile, il peut très bien défendre en 4. En attaque, ça dépend encore des moments. Il faut qu’on l’utilise mais pas de manière systématique. À l’intérieur, on a la chance d’avoir une vraie régularité. Entre Guerschon et Matthias, on a deux joueurs d’impact mais on doit encore trouver les associations qui sont les plus intéressantes, à différents moments du match. On doit mieux sanctionner les duels que nous proposent l’adversaire. On n’a pas été capable de le faire face au Canada par exemple, quand [Dillon] Brooks défendait sur Victor. Il pouvait difficilement prendre le dessus à 7 ou 8 mètres du panier, mais on n’a pas réussi à bien le servir plus proche du cercle.
On n’a malheureusement pas pu discuter avec Kenny Atkinson de son rôle dans le staff, mais lui aussi fait partie des nouveautés de l’été en Équipe de France, qu’apporte-t-il au groupe et qu’est-ce qui vous a motivé à le faire venir ?
On cherchait un regard différent, une vision différente, quelqu’un qui connaisse la NBA sur le bout des doigts. Car, comme vous l’avez remarqué, nos adversaires ont tous beaucoup de joueurs NBA, et des joueurs NBA d’impact, qui ont des minutes dans leur franchise respective. Le Canada par exemple a sept joueurs extérieurs qui ont de vrais rôles dans leur équipe. On voulait avoir quelqu’un qui a cette connaissance. Sur cette prépa, on n’a pas fait beaucoup de scouting, volontairement parce que ce sont des adversaires qu’on peut potentiellement rejouer. Le bon côté, c’est qu’on travaille plus. Le mauvais, c’est que ça change la donne. Maintenant qu’on va le faire à nouveau, Kenny va nous apporter son éclairage sur des joueurs qu’il connaît beaucoup mieux que nous. Ça va être important sur les aspects défensifs. Et plus généralement, il apporte sa culture. Dans l’organisation des séances, il prend en charge une partie des entraînements, tout ce qui est exercices, il a un vrai savoir-faire qui est très complémentaire. Je suis très satisfait de son apport.
Propos recueillis à Orléans