Voilà déjà 26 ans que les Hornets ont sélectionné Kobe Bryant à la Draft, avant de l’envoyer aux Lakers contre Vlade Divac. Le natif de Philadelphie réalisait alors son rêve de porter les mêmes couleurs que son idole, Magic Johnson, et c’est le 12 juillets 1996 qu’il a officiellement été présenté aux fans de Los Angeles.
Pourtant, en 1996, le regretté Kobe n’était pas censé arriver chez les « Purple & Gold ». Un autre coach le convoitait avec le 8e choix de cette même Draft : John Calipari, à la tête des Nets.
« John voulait absolument Kobe et il s’est fait avoir », racontait John Nash, alors GM de l’équipe. « Tout le monde savait que je le voulais », avait ensuite confirmé Calipari auprès d’ESPN.
Une Draft exceptionnelle
Les talents ne manquaient pas dans cette cuvée 1996. De Allen Iverson à Ray Allen, en passant par Steve Nash, Marcus Camby, Predrag Stojakovic, Stephon Marbury, Jermaine O’Neal ou encore Shareef Abdur-Rahim, il y avait peu de chances de commettre un impair. Mais John Calipari n’avait de yeux que pour le lycéen de Lower Merion.
La volonté du coach était inaltérable et il était persuadé que Kobe Bryant porterait le maillot des Nets. Malheureusement pour lui, un de ses propriétaires n’était pas convaincu. Joe Taub préférait John Wallace et il craignait que le lycéen ne convoite un plus gros marché et parte dès que possible. Il s’avérera que l’homme d’affaires avait raison.
À 17 ans, le futur « Black Mamba » ne partageait déjà pas les mêmes ambitions. Quelques heures avant la Draft, Arn Tellem, l’agent du joueur, avait appelé le GM des Nets pour le menacer d’envoyer Kobe Bryant en Italie si New Jersey venait à le sélectionner ! Rapidement, John Nash découvre le pot-aux-roses : en coulisses, Jerry West a passé un accord avec les Hornets pour récupérer le 13e choix. Le GM des Lakers est convaincu que, si Bryant passe le 8e choix, il tombera jusqu’à cette position…
Le camp de Kobe a fait pression sur les Nets
John Nash est persuadé que Kobe Bryant et son agent bluffent mais, en parallèle, il reçoit le coup de fil d’un autre éminent agent, David Falk, qui lui parle de son protégé, Kerry Kittles. Sous pression, John Calipari cède à la proposition du GM.
« John avait un contrat de cinq ans. Je lui ai dit qu’il aurait d’autres opportunités s’il manquait son Kobe Bryant. »
Le GM des Nets avait tort. Son coach ne restera finalement que deux ans et demi aux Nets et Kerry Kittles n’a pas réalisé la carrière que l’on lui prêtait.
« Je vais être honnête : pour rien au monde je n’aurais manqué l’opportunité de coacher Kerry Kittles », révélera plus tard le coach. « J’adore Kerry. J’ai dit à cette époque que Kerry serait meilleur que Kobe les deux premières saisons mais que, les cinq saisons d’après, Kobe serait intouchable. »
John Calipari : « Je suis un meilleur coach depuis… »
À sa décharge, Kerry Kittles était attendu comme un futur All-Star et, à l’époque, peu de responsables seraient allés aussi loin que John Calipari avec un lycéen, aussi talentueux soit-il. D’ailleurs, en choisissant respectivement Lorenzen Wright, Vitaly Potapenko ou encore Todd Fuller, les Clippers, les Cavaliers et les Warriors ont aussi manqué une belle opportunité…
Viré lors de sa troisième saison, avec seulement trois victoires au bout de vingt matchs, John Calipari est revenu sur cet épisode, sans aucune amertume. Car rien ne dit qu’avec Kobe Bryant, les choses seraient allées dans un meilleur sens.
« Serait-il resté ? Il aurait pu demander un échange au bout d’un ou deux ans. On ne sait jamais. Plein de choses auraient pu arriver« , concluait-il en 2014. « Cela m’a servi de leçon. Je suis un bien meilleur coach depuis. Ça vous enseigne l’humilité d’être viré et d’entendre que l’on ne veut plus de vous. »
La version de Kobe
Quant à Kobe Bryant, il a donné sa version des faits il y a quelques années, expliquant pourquoi les Hornets l’avaient transféré chez les Lakers : « Charlotte n’a jamais voulu de moi et leur coach [Dave Cowens, ndlr] m’a dit qu’il ne me voulait pas », avait raconté la star de Los Angeles sur ESPN. « Il n’était même pas question que je joue là-bas. Ils avaient déjà deux arrières et deux ailiers. »
Comment avait-il réagi en apprenant que le coach de Charlotte ne voulait pas de lui ? « J’ai grandi en regardant du basket et je connaissais Dave Cowens. J’étais emballé à l’idée de jouer pour lui. Lorsqu’il m’a dit ça, j’ai répondu quelque chose comme : ‘Ah… OK’. Puis j’ai rapidement transformé mon sourire de gamin en instinct de tueur. »
Pour Kobe Bryant, ce n’est donc pas son agent qui a fait le forcing pour que les Nets ne le sélectionnent pas. Pas plus qu’il n’a fait pression sur les Hornets pour l’envoyer aux Lakers. « Ce n’était pas le cas. Le coach m’a dit : ‘On n’a vraiment pas besoin de toi ici’. »
Vlade Divac ne voulait pas aller à Charlotte…
Il reste tout de même un obstacle à l’échange : Vlade Divac, alors pivot de Los Angeles. Le Serbe ne met pas son véto au transfert parce qu’il n’en a pas le pouvoir, mais il menace de prendre sa retraite s’il est envoyé à Charlotte…
« J’avais l’impression que quelqu’un m’avait fait un enfant dans le dos. C’était la première fois de ma carrière que quelque chose ne se passait pas comme je l’avais prévu. J’étais anéanti. Je jouais pour le plaisir. Quand j’ai reçu mon premier chèque, mon père m’a dit : ‘Qui t’a donné ça ? Est-ce qu’ils sont fous ? Ils ne savent pas que tu jouerais même s’ils ne te payent pas ?’ Mais je n’allais pas jouer au basket parce que j’y étais forcé et j’ai dit à mon agent que je ne rejoindrais pas Charlotte. »
De retour en Californie pour annoncer sa retraite à ses dirigeants, Vlade Divac accepte néanmoins de rencontrer Jerry West, son mentor, en amont. Un déjeuner qui va finalement convaincre Divac d’accepter la décision, et de changer du même coup le destin des « Purple & Gold »…
« Jerry m’a appelé. Il y avait un accord de principe, mais je faisais barrage. Jerry m’a dit : ‘Pourquoi tu n’essaies pas au moins, pour voir si ça te plait ?’. Jerry et moi avions une super relation. C’est lui qui était venu me chercher à l’aéroport après la Draft 1989. Il y avait beaucoup d’émotions et j’avais tellement confiance en lui. C’est le plus grand cerveau du basket. Quand Jerry vous dit quelque chose, vous y croyez. »
Et voilà comment Kobe Bryant a quitté les Hornets pour rejoindre les Lakers…