Légende du basket français dont il a été le leader en sélection pendant une bonne dizaine d’années jusqu’à cette fameuse médaille olympique à Sydney en l’an 2000, Antoine Rigaudeau n’est plus directement impliqué dans les affaires d’un club, comme il a pu l’être par le passé, que ce soit directeur sportif au Paris Basket (en 2006) ou entraîneur au Paris-Levallois (en 2015). Mais il en reste un observateur averti, souvent aperçu dans les travées des salles françaises, à Cholet ou ailleurs.
« Il y a un déficit de passes dans le jeu actuel »
Comme Nikola Jokic qui adore aussi cette expression, Antoine Rigaudeau regrette le collectif à l’ancienne, avec un jeu de passes plus riche que dans le basket moderne, inévitablement influencé par la NBA.
« La passe ne rend pas heureux deux joueurs, mais cinq ! », explique « le Roi » sur Skweek, dans une interview rétrospective de sa carrière réalisée sur les planches de ses débuts à la Meilleraie, dans sa ville natale de Cholet. « Je pense vraiment qu’il y a un déficit de passes dans le jeu actuel. On ne se fait plus de passes, on ne fait plus vivre le ballon. Et encore plus peut-être, dans le basket français, on a beaucoup de joueurs qui dribblent beaucoup, mais des dribbles qui sont inutiles. »
S’il était très à l’aise sur le terrain du point de vue tactique, Antoine Rigaudeau a en revanche été à l’étroit dans le costume d’entraîneur. Une deuxième carrière qui a tourné court, au Paris-Levallois en 2015, au bout de sept mois et un bilan de 5 victoires pour 10 défaites.
« Je n’ai pas pris plus de plaisir que ça à entraîner. Entraîner au quotidien, s’occuper des jeunes et leur faire comprendre les choses, [ça me plaisait] mais là où je ne prenais pas de plaisir, c’était le match en lui-même. Pour manager l’équipe et voir ce qui se passait sur le terrain… Alors, je voyais des choses, mais ce n’était pas en adéquation avec ce dont l’équipe avait besoin. Et puis, le message ne passait pas. Il n’y avait pas de plaisir, je n’avais pas les bonnes sensations. C’est comme ça que je fonctionne et là, ça ne marchait pas. Il valait mieux dire stop parce que ça devenait négatif pour tout le monde. »
« Les clés, ça ne se donne pas, ça se mérite »
Spectateur attentif des desseins tricolores dans les compétitions internationales, Antoine Rigaudeau a évidemment été marqué par l’échec de la dernière Coupe du monde. Il regrette que le groupe n’ait pas été dans ce sentiment d’urgence, et d’union sacrée qui lui avait permis de se sublimer par le passé. Et à l’avenir, l’espère-t-il.
« Pour moi, tout repart à zéro à chaque compétition. Peu importe de qui on parle, il faut venir en Équipe de France avec la mentalité de prouver qu’on peut faire partie du groupe. Il y a possibilité d’aller chercher une médaille [aux prochains JO]. Sur la dernière compétition, j’ai trouvé que les objectifs de chacun n’étaient pas l’objectif commun. Dans n’importe quelle équipe, s’il n’y a pas cette volonté commune d’aller au même endroit, et de faire ce qu’il y a à faire pour y arriver, il y a peu de chances que l’objectif soit atteint. »
Et pas question de donner directement les clés des Bleus à Victor Wembanyama, pour Antoine Rigaudeau.
« Les clés [de l’Équipe de France], ça ne se donne pas, ça se mérite. Que ce soit les joueurs, ou les membres du staff, pour pouvoir devenir un leader, il faut le prouver au quotidien. Et pas seulement pendant les matchs. [Dans le cas de Wembanyama], il va devoir prouver qu’il est capable d’assumer ça. Mais ce n’est pas le fait d’un seul joueur, on revient sur l’aspect collectif, c’est tout un groupe qui fera en sorte d’aller chercher cette médaille. De manière générale, je ne suis pas en faveur de créer une hiérarchie parce qu’untel joue en NBA, untel a gagné un titre… »