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Le Roi sans couronne : quand Antoine Rigaudeau jouait en Summer League

Légende du basket français, Antoine Rigaudeau a goûté un peu à la NBA, et ce fut un échec.

C’est l’été 94. La Rocky Mountain Revue bat son plein à Salt Lake City. Et un meneur blanc-bec en provenance des Mauges s’attaque à la montagne NBA.

Flashback sur ce moment méconnu du parcours d’Antoine Rigaudeau : son passage en summer league avec les Rockets. Il avait alors 24 ans.

Resituons d’abord le contexte. Les Houston Rockets sont champions NBA pour la première fois de leur histoire outre-Atlantique sur les épaules du mythique Hakeem Olajuwon (27 points, 10 rebonds, 4 contres et 4 passes de moyenne sur les finales – et contre Pat Ewing s’il vous plait). Et comme chaque été, ils envoient une équipe de summer league disputer la prestigieuse Rocky Mountain Revue organisée par le Jazz.

Dans l’Hexagone, Antoine Rigaudeau régale avec son équipe de Cholet en remportant cette année-là son 4e titre de MVP français consécutif. Mais son club, pourtant 3e de la saison régulière, cale encore en playoffs en se faisant sortir par le PSG Racing dès le premier tour.

N’ayant plus rien à prouver sur la scène française, le meneur choletais veut se tester dans les eaux américaines après avoir raté plusieurs occasions de participer à des camps NBA pour cause de blessure ou de sélection en équipe de France.

Des intermittents du spectacle NBA

Pour la première fois donc, Antoine Rigaudeau se donne les moyens de se frotter au niveau NBA. Au menu du français, huit équipes dont les Blazers d’Aaron McKie et James Robinson, le Jazz de Bryon Russell, Reggie Slater et (le fameux) John Crotty, les Kings de Bobby Hurley ou encore les Suns de Wesley Person et Oliver Miller.

Dans l’équipe de Houston, notre frenchy fait couche commune avec le Colombien Alvaro Teheran, pivot massif drafté au second tour de la draft 1991 par les Sixers, et recruté par les Rockets du fait que Teheran a effectué sa carrière universitaire sur place. Sur le terrain, il doit partager la gonfle avec Larry Robinson qui écumait la NBA depuis 1990 (entre Golden State, Boston et Washington) – et était passé par Levallois, l’ailier Tim Breaux qui sort de plusieurs piges en CBA , lui aussi en France (à Tours) et dernièrement en Espagne (au Pamesa Valencia)ou encore Ashraf Amaya, également ressortissant de CBA mais qui jouera plus tard pour la saison inaugurale des Grizzlies, et plus étonnant encore, remportera la médaille de bronze avec l’équipe américaine dépourvue de ses stars NBA au mondial 1998.

Vous l’aurez compris, notre héros est entouré d’intermittents du spectacle NBA. Et pourtant, il n’obtient que des bribes de temps de jeu. 16 petites minutes de moyenne pour 6 points, 1 rebond, et 2 passes. C’est bien maigre !

Antoine s’en explique dans Maxi Basket : « A chaque fois que tu es en attaque, deux voire trois joueurs se placent complètement à l’écart pour favoriser le un-contre-un des coéquipiers. Le problème, c’est que ce sont souvent les mêmes qui bénéficient des balles d’attaque, et évidemment toujours les mêmes qui les regardent jouer. »

La NBA d’antan…

Visiblement mis à l’écart dans le jeu, l’accueil réservé au meilleur joueur français laisse également à désirer de la part des tout frais champions en titre. Mais de manière générale, c’est un rapport impersonnel et complètement dénué d’émotions qui attend les participants du camp. « Il n’y a pas eu de présentation. Un coach est venu me chercher à l’aéroport de Houston et m’a déposé dans un hôtel où se trouvait également le croate Zan Tabak. Le jour du rassemblement, le staff a seulement regroupé tous les joueurs. (…) Je n’étais qu’un pion parmi tous les autres. »

Mais dans une équipe composite, avec des joueurs tout juste draftés qui s’adaptent à leur nouvelle vie professionnelle, des vieux routiers qui veulent enfin percer, des joueurs NBA qui sont surveillés dans leur progression, et les « outsiders » Européens tels que Rigaudeau qui viennent goûter au niveau américain, difficile de créer quelque cohésion collective.

« Les joueurs pensaient que je venais pour leur piquer leur place. En fait, je n’ai pas trop eu de relations avec eux. Ils sont très protectionnistes. Aucun n’est venu vers moi. (…) Les relations avec l’encadrement sont identiques. Les entraîneurs sont très distants du groupe. On doit être présents aux rendez-vous, on dort tous dans le même hôtel, mais on fait ce que l’on veut de notre temps libre. Tu reçois tous les jours 60$ et tu te débrouilles. J’en ai profité pour assister à un concert de Phil Collins. »

Quand la NBA crachait sur l’Europe

Loin de dramatiser sa situation, le meneur des Bleus était là pour apprendre. Décalé en arrière shooteur ou ailier, il venait avant tout pour se mesurer au jeu physique de la NBA et voir quels étaient les secteurs sur lesquels il devait progresser pour retourner à ce niveau dans de bonnes conditions. « Etre meneur, il ne fallait pas y compter. Mes agents avaient pourtant envoyé des cassettes à Houston pour qu’ils sachent comment m’utiliser. Enfin bon. J’aurais eu de toute façon du mal comme meneur. (…) Mon jeu ne correspond pas vraiment au basket qu’ils pratiquent. La plupart des américains sont butés. Un peu « bœufs. » Ils ne savent pas trop shooter, et se compliquent souvent la vie en systématisant les pénétrations. Ils se prennent des casse-croûte en dessous et pourtant ils y retournent. Ils pensent trop au dunk ou au lay-up, au contact physique pour chercher la faute, là où parfois il serait bien plus facile de prendre un tir à 4 mètres. »

Mais avec son nom salement écorché sur la feuille de matchs (Rigadeau) et sa taille visiblement dévaluée (1m95 au lieu de 2m00), celui qui allait devenir le « Roi » d’Europe quelques années plus tard à la Virtus, n’était alors qu’un joueur de plus dans l’effectif d’une équipe d’été… Ses déclarations au sortir de son été américain sont significatives de l’arrogance américaine vis-à-vis des meilleurs joueurs européens qui arrivent tout juste à percer en NBA. Ambiance… « Ca vient de leur mépris, car ils savaient qui j’étais. Je comprends maintenant pourquoi Drazen Petrovic a mis du temps pour réussir en NBA et pourquoi Toni Kukoc souffre à Chicago. Les Américains sont suffisants avec les Européens mais je les comprends. Ils ont de la fierté car dans leur pays tout est immense, super grand, impressionnant. »

Autre exemple : le grand gourou de « Clutch City », Rudy T, qui caresse le Vieux Continent dans le sens du poil, en se déclarant « fasciné » par la compréhension du jeu et le shoot de Rigaudeau mais qui ne lui propose même pas de place dans son camp d’entraînement. Au lieu de cela, Tomjanovic a misé sur Chucky Brown, Pete Chilcutt et Tim Breaux…

Pas nécessairement conquis par son expérience dans la grande ligue, Antoine Rigaudeau garde cependant sa répartie intacte et son sens de l’humour à la question de sa venue prochaine en NBA. « Beaucoup d’Européens peuvent gagner leur place s’ils gagnent des kilos supplémentaires et s’acclimatent au jeu. Ce n’est peut-être pas un hasard si mon meilleur match fut le dernier (14 points). »

Il ne le sait pas encore, mais malheureusement, son analyse s’avérera visionnaire de son unique opportunité de jouer en NBA avec les Dallas Mavericks, quand elle arrivera, neuf longues années plus tard. Ce fut un échec retentissant. Une petite tâche dans une carrière exceptionnelle.

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